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D3 - Les brevets

La propriété intellectuelle (PI) sur une invention prend la forme d'un brevet, qui confère à son titulaire, pour une période limitée (20 ans après le dépôt de la demande, en général), le droit exclusif d'exploiter l'invention, c'est-à-dire la fabriquer, l'utiliser ou la vendre, ou encore d'autoriser ces actes.

Un inventeur n'est pas automatiquement titulaire de la PI sur son invention. Un brevet ne lui sera accordé qu'à la suite d'une demande en ce sens, effectuée auprès de l'organisme compétent à l'aide d'un dossier détaillé, et ce pour chaque pays où il désire détenir le monopole sur son exploitation. Seul l'inventeur, ou quelqu'un qu'il autorise à le faire en son nom, peut déposer cette demande.

Un brevet ne peut être accordé que pour l'incarnation physique d'une idée. Cette incarnation peut prendre la forme d'un produit, d'une formule (composition chimique ou autre), d'un appareil, ou encore d'un procédé ou d'une méthode produisant des résultats tangibles. L'objet lui-même n'a pas besoin d'exister physiquement, mais il doit être décrit de façon concrète et détaillée, généralement à l'aide de figures.

On peut aussi obtenir un brevet pour une amélioration d'un objet déjà existant appartenant à l'une ou l'autre de ces catégories. Toutefois, si cet objet est lui-même protégé par un brevet, un accord de son titulaire, sous la forme d'une licence par exemple, sera requis pour exploiter la nouvelle invention.

Les principes ou théorèmes scientifiques, les traitements médicaux et (au Canada) les programmes informatiques ne peuvent pas être directement protégés par brevet. Ces derniers peuvent toutefois l'être indirectement, par un brevet couvrant un procédé qui comprend un logiciel ou un appareil qui inclut un ordinateur programmé.

De plus, pour pouvoir être brevetée, une invention doit répondre aux exigences suivantes :

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être nouvelle;

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être utile;

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témoigner d'ingéniosité;

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ne pas relever de l'évidence pour une personne familière avec le domaine.
  

Les sites web des organismes de gestion de la PI donnent accès à des bases de données qui permettent à un inventeur de vérifier si une invention semblable à la sienne a déjà été brevetée, ou fait l'objet d'une demande de brevet. À cette fin, les demandes de brevet sont rendues publiques un certain temps après leur dépôt (18 mois au Canada).

Une invention n'est plus considérée comme nouvelle et, de ce fait, ne peut plus être brevetée, si elle a été divulguée, c'est-à-dire décrite publiquement. Dans quelques pays (dont le Canada et les États-Unis), cette non-brevetabilité prend effet 12 mois après la divulgation publique. Dans les autres pays, elle entre en vigueur au moment de cette divulgation, à moins qu'une demande de brevet n'ait été au préalable effectuée (dans n'importe quel pays).

De plus, dans la plupart des pays, si deux personnes déposent des demandes pour une même invention, en désignant des inventeurs différents, c'est la première demande qui sera retenue, quelle que soit la personne qui a réalisé l'invention en premier.

Il est donc important de faire rapidement (dans un délai d'un an au maximum) des demande de brevets dans tous les pays où l'on désire exploiter l'invention. Il faut également éviter de décrire l'invention dans des documents, ou même de trop en parler autour de soi, avant d'avoir déposé les demandes de brevet.

La démarche reliée à une demande de brevet est assez complexe; le recours aux services de spécialistes (agents de brevets, avocats) est fortement suggéré. De plus, elle entraîne des frais importants tant au départ, pour la recherche et l'étude du dossier, que durant la période de validité du brevet, alors que des frais récurrents sont exigés pour son maintien. Au total, pour chaque pays où l'on enregistre un brevet, on parle de plusieurs milliers, voire de dizaines de milliers de dollars pour la durée de validité d'un brevet.

Par ailleurs, une bonne partie des inventeurs confient à des entreprises le soin d'exploiter leur invention. Pour ce faire, ils leur accordent une licence d'exploitation, ou cèdent tout bonnement leur brevet, généralement en échange d'avantages financiers, sous forme d'un montant forfaitaire ou de redevances.

À la différence de la loi sur le droit d'auteur, la loi sur les brevets est muette quant à la titularité des brevets sur les inventions réalisées par les employés dans le cours de leur emploi. C'est la jurisprudence qui a fixé des balises permettant de déterminer dans quelles conditions une entreprise peut revendiquer la titularité de ces brevets; en bref, cela est possible seulement si l'employé a été embauché dans le but explicite de réaliser des inventions, ou si le contrat de l'employé prévoit que ces brevets appartiennent à l'employeur.

Par ailleurs, les politiques institutionnelles des universités prévoient généralement des modalités assez précises en ce qui touche les inventions réalisées par leur personnel ou les étudiants (voir, par exemple, celle de la Télé-université, 2007a, section 6.7). Ces politiques assez variées, épousent en général l'un ou l'autre des deux modèles suivants; on donne souvent à l'inventeur le choix entre les deux.

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L'inventeur, qui demeure titulaire de la PI, prend en charge toutes les étapes menant à la commercialisation (dont la première est très souvent la demande de brevet). L'université, qui n'intervient plus à ce moment, exige parfois, en guise de compensation pour les ressources (salaires, locaux, etc.) qu'elle a fournies, un droit d'utilisation de l'invention aux fins de ses activités d'enseignement et de recherche, et (ou) une participation (modeste) aux éventuelles retombées financières.

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L'université participe à ces étapes, ou les prend carrément en charge avec la collaboration de l'inventeur; elle défraie les coûts associés, en échange de la cotitularité, voire de la titularité unique du brevet et d'une participation significative (souvent 50 %, voire plus) aux éventuelles retombées financières.

Compte tenu des coûts importants qu'entraînent les demandes de brevets, il faut qu'une invention connaisse un grand succès pour qu'elle puisse faire ses frais. En pratique, seule une infime minorité d'inventions connaissent ce sort, donnant lieu parfois, il est vrai, à d'impressionnantes retombées financières, qui peuvent se chiffrer à des dizaines, ou même des centaines de millions pour quelques universités.

Près de chez nous, mentionnons à ce propos l'Université de Sherbrooke, qui mène le palmarès canadien avec des redevances cumulatives de près de 175 millions de dollars (source : site de l'Université). Précisons cependant que ce montant découle en grande partie d'une seule technologie, relative à une technique de compression de la voix implantée dans la plupart des téléphones cellulaires de la planète.

  

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