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A6 - Les sources d'information et le contrôle de qualité

L'information scientifique, qu'elle se présente sous la forme de textes, d'images ou de données numériques, peut provenir de diverses sources. Selon les sources, elle aura été soumise à un processus de contrôle de qualité plus ou moins formel et rigoureux.

Voici la description du processus de contrôle de qualité qui s'applique à quatre types de documents scientifiques que permet de repérer une recherche sur un sujet scientifique dans une base de données bibliographique ou dans Internet :

-

les manuels et livres de référence;

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les articles et comptes rendus de conférence;

-

les ressources et documents institutionnels;

-

les documents personnels.

En science, le processus de contrôle de qualité par excellence est l'évaluation par les pairs (voir la section e).

a)

Les manuels et livres de référence

Les manuels (textbooks) (exemple) et livres de référence (handbooks) ) (exemple) sont la plupart du temps rédigés par des chercheurs qui ont fait leur marque dans le domaine. Ils sont ensuite généralement soumis à un processus d'évaluation par d'autres chercheurs de ce même domaine; c'est ce qu'on appelle l'évaluation par les pairs (voir la section e).

Les manuscrits sont également relus par diverses personnes participant au processus d'édition, dont souvent un responsable de collection familier avec le domaine.

Une bonne partie de ces ouvrages sont publiés par des organisations universitaires ou disciplinaires; le nom de l'éditeur comprend alors celui de l'organisation, par exemple : Presses de l'Université du Québec, Cambridge University Press. D'autres sont publiés par des maisons d'édition scientifique privées; en science, les principales sont Elsevier (comprenant Academic Press), Pearson Higher Education (comprenant Addison-Wesley et Prentice-Hall), Wiley-Blackwell, Springer (comprenant Kluwer) et Taylor & Francis. Plusieurs de ces éditeurs publient également des revues scientifiques (jusqu'à plusieurs centaines, voire des milliers pour un même éditeur). Du côté francophone, on retrouve surtout des manuels, publiés par des éditeurs comme Hermann, Dunod et Lavoisier.

Il arrive cependant que des chercheurs marginaux publient des ouvrages non soumis à ce processus d'évaluation, soit chez des éditeurs non spécialisés en science, soit à leur propre compte. Lorsqu'un livre portant sur un sujet scientifique est publié par un éditeur non universitaire, ou une maison d'édition autre que celles qui ont été mentionnées plus haut, il conviendra de vérifier dans le site de l'entreprise le type d'ouvrages qui y sont généralement offerts.

On retrouve également des manuels en ligne en accès libre (Open textbooks) (exemple). Il faut alors vérifier au cas par cas la compétence de l'auteur et la présence d'une forme un d'une autre d'évaluation de la qualité.

b)

Les articles scientifiques, chapitres d'ouvrages collectifs et comptes rendus de conférences

On peut souvent distinguer les revues scientifiques (exemple), qui ont elles aussi recours à l'évaluation par les pairs, des autres types de revues grâce à leur titre, qui prend des formes comme Revue de [domaine], Journal of [domaine spécialisé ou organisation scientifique], [Domaine spécialisé] Review. Mais certaines, et parmi les plus prestigieuses, possèdent des titres moins explicites, tels Nature, ou The Lancet.

Dans le doute, on cherchera l'identité de la maison d'édition ou de l'organisation responsable, ou encore on vérifiera, en consultant son site web, si la revue applique le processus d'évaluation par les pairs; les responsables de cette évaluation (directeur de la revue et membres du comité éditorial) sont en général clairement identifiés.

Vous trouverez dans Engle (2009) des critères ou indicateurs détaillés permettant de distinguer les revues scientifiques des autres types de périodiques.

Les chapitres d'ouvrages collectifs, c'est-à-dire des livres dont les chapitres individuels sont rédigés par des auteurs différents, font aussi généralement l'objet d'une évaluation par les pairs, en plus du travail d'harmonisation effectué par les directeurs de la publication. En règle général, ils sont publiés par des maisons d'édition scientifiques ou universitaires, ou encore des organisations scientifiques ou professionnelles.

Dans leur format traditionnel imprimé, les comptes rendus des congrès ou colloques sont simplement des ouvrages collectifs, dont les chapitres sont formés d'une partie, voire de l'ensemble des communications présentées au congrés. Ces chapitres sont donc aussi, en règle générale, évalués par des pairs. Mais, de plus en plus souvent, les comptes rendus sont diffusés en ligne. Dans ce cas, il arrive parfois que seul le résumé, et non le texte de la communication ait été évalué. Par ailleurs, ces rencontres sont très souvent placées sous l'égide d'une organisation disciplinaire, qui se porte ainsi garante du caractère scientifique de l'événement. Les sites mis en place pour la plupart des congrès ou colloques (exemple) fournissent généralement l'information relative à l'organisation de la conférence et à l'évaluation des communications.

c)

Les ressources et documents institutionnels

Contrairement aux documents mentionnés précédemment, et à l'exception des mémoires et des thèses, qui font l'objet d'une évaluation rigoureuse aux fins de diplomation, les documents que les organisations publiques ou parapubliques, universitaires ou autres, publient ou déposent dans les sections officielles (c'est-à-dire ailleurs que dans les sites personnels de leurs employés) ne sont pas en général soumis à une évaluation par les pairs.

Cependant, ces documents doivent habituellement avoir été examinés et acceptés pour diffusion par une personne en autorité, car l'organisation pourrait être tenue (avec l'auteur) responsable de tout préjudice causé par la publication du texte. Cela assure un certain contrôle, variable selon les situations, sur la forme et le contenu.

Ceci s'applique tout particulièrement à l'information présente sur les sites gouvernementaux et ceux des organismes publics ou parapublics. Ces organisations appliquent en général des normes rigoureuses destinées à assurer la rigueur et la qualité de l'information qu'elles diffusent. Cela vaut tant pour les divers types de rapports (de recherche) qu'elles diffusent que pour les banques de données qu'elles rendent accessibles.

Il faut cependant toujours user de prudence, car les organismes gouvernementaux peuvent à l'occasion subir des influences politiques qui affectent leurs décisions en matière de diffusion de l'information; dans les régimes autoritaires, c'est d'ailleurs la norme plutôt que l'exception.

Enfin, pour les documents diffusés par les organisations à but non lucratif et les entreprises privées, il n'existe aucune assurance qu'un processus de contrôle de qualité de l'information est à l'œuvre. Tout dépend non seulement des ressources financières que l'organisation est disposée à consacrer à cet objectif, mais aussi, et surtout pourrait-on dire, de la façon dont l'entreprise ou l'organisation gère les possibles conflits entre le respect de la rigueur et la promotion de ses intérêts.

d)

Les documents personnels

À moins qu'il ne s'agisse de la reproduction d'un document ayant été publié ou diffusé à la suite d'un contrôle de qualité, un document déposé sur un site personnel ou un blogue (exemples), tout comme un livre publié à compte d'auteur, n'a de crédibilité que celle qu'on reconnaît à son auteur. Les Anglo-saxons ont d'ailleurs inventé l'expression « vanity press » pour désigner ce type de publication ou de diffusion.

La même remarque s'applique aux données factuelles ou numériques fournies sur ce genre de site. J'ai plus d'une fois fait les frais d'erreurs dans des informations de ce type que j'avais trouvées dans les sites personnels de professeurs d'université. Il importe donc de toujours contrevérifier ce type d'informations.

Mentionnons cependant que les commentaires que l'on retrouve à la suite d'un billet de blogue peuvent parfois nous donner une ideé du sérieux et de la qualité de son contenu, surtout quand les commentateurs indiquent clairement leur identité et leur statut; on peut alors y retrouver une forme d'évaluation par les pairs.

e)

L'évaluation par les pairs

L'évaluation par les pairs consiste à soumettre à des chercheurs du domaine (deux ou trois en général) un article ou autre texte destiné à être publié. Ceux-ci se prononcent sur sa qualité, son exactitude et sa rigueur, ainsi que sur d'autres critères comme sa pertinence et son originalité. De plus, ils en recommandent ou non la publication, la plupart du temps sous réserve de corrections à apporter au texte. La décision finale d'accepter ou de refuser le texte, de même que le processus d'évaluation lui-même, sont sous la supervision d'un responsable (le directeur, ou rédacteur en chef, dans le cas d'une revue), qui est normalement lui aussi un chercheur du domaine ou d'un domaine connexe. Celui-ci s'adjoint généralement un comité éditorial (appelé aussi comité scientifique) formé de chercheurs actifs dans le domaine et provenant souvent de divers pays.

Cette évaluation s'effectue généralement de manière anonyme, c'est-à-dire que les auteurs ne connaissent pas l'identité des évaluateurs (on parle alors de simple insu) et, souvent, ceux-ci ne connaissent pas non plus celle des auteurs (double insu).

Les revues publiées par les grandes maisons d'édition scientifiques privées et par les organisations universitaires ou disciplinaires (comme IEEE en ingénierie, ACM en informatique, APS en physique, ACS en chimie, etc.) emploient toutes ce système.

Bien que l'évaluation par les pairs qui, soit dit en passant, ne s'est généralisée en sciences qu'à partir du milieu du 20e siècle, fasse l'objet de nombreuses critiques (Nielsen, 2009), la plupart des scientifiques reconnaissent qu'il s'agit là de la moins mauvaise solution au problème du filtrage des articles de qualité douteuse.

Mais à l'ère du web 2.0, de plus en plus de voix contestent ce mode d'évaluation. Certains proposent de le remplacer par les systèmes d'évaluation propres au web, comme les commentaires, les systèmes de recommandation, les données de téléchargement et de référencement, etc. Mais, pour le moment, rien ne permet de conclure que l'évaluation par les pairs est appelée à disparaître, ou même à perdre de l'importance.

Il faut tout de même être conscient que, pour toutes sortes de raisons, les chercheurs et les évaluateurs ne prennent pas toujours le temps, ou n'ont simplement pas la possibilité, de vérifier tous les détails d'un article. S'il est rare (mais il existe des exemples célèbres) qu'un article médiocre ou carrément erroné soit accepté, on retrouve à l'occasion dans les articles publiés des erreurs relativement mineures, par exemple dans les équations, les tableaux ou les références.

Le fait que plusieurs revues incluent, à côté de la qualité et de la rigueur, des critères hautement subjectifs comme la pertinence et l'originalité fait aussi l'objet de débats au sein de la communauté scientifique. À cet égard, l'initiative de la revue en accès libre PLoS One (http://plosone.org), qui exclut ce type de critères de l'évaluation par les pairs qu'elle impose aux articles soumis, est exemplaire.

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